SAINT-SORNIN: Stèle le Montcel
C’est dans le petit chemin qui s’enfonce dans les champs vers le sud et que l’alignement des arbres rappelle que les deux jeunes, André HUBSCHWERLIN et Robert RIOTHON, faits prisonniers par les allemands en partant de Montluçon le 26 juillet 1944 furent fusillés et laissés pour morts. Les Allemands les avaient pris à Deneuille les Mines et les avaient fait déjeuner à La Croix du Châgne avant de commettre leur forfait le lendemain matin à quelques kilomètres de là.
Des deux, Robert RIOTHON, grièvement blessé, a cependant réussi à se sauver, gagnant une ferme des environs pour y être pris en charge et soigné.
C’est l’histoire de deux jeunes ouvriers montluçonnais…
EN SOUVENIR DES JEUNESSES COMMUNISTES DE SAINT-SORNIN




Transcription de l’article du journal « Le Centre Républicain » paru le 25 septembre 1944
COMMENT LES BOCHES MASSACRAIENT LES PATRIOTES FRANÇAIS
RÉCIT D’UN FUSILLÉ
Avoir été fusillé par les boches et être encore vivant, telle est l’incroyable aventure arrivée à Albert RIOTON.
Pour échapper au S.T.O., il travaillait à Deneuille. Au mois de juillet dernier, une colonne allemande cerna la petite bourgade, postant des soldats sur toutes les routes conduisant à l’agglomération. Rioton et un de ses camarades alsacien, Ischmerling, essayèrent de s’enfuir par les champs. les boches les aperçurent, tirèrent dans leur direction sans les toucher, mais cernèrent le champ et les deux jeunes français furent obligés de se rendre. Les chleus (1) commencèrent par les bourrer de coups de crosse.
– J’en avais les reins tout bleus, dit Rioton en faisant le récit de son aventure.
Les deux prisonniers, baptisés terroristes, furent embarqués dans un camion. Au cours d’une conversation entre un officiers et le chauffeur, l’alsacien comprit que les deux captifs étaient destinés à être fusillés le lendemain matin. Ils passèrent à Villefranche, puis à Chavenon où la colonne allemande fit halte pour la nuit. Les deux français ligotés, furent gardés dans le camion. Au milieu de la nuit, un boche vint près d’eux et leur dit:
– Demain vous serez libres !
Il leur offrit même des cigarettes;
A six heures du matin, le camion emmenant les deux jeunes gens et deux sergents des brigades SS munis de mitraillettes, s’ébranla. Il s’arrêta un peu plus loin, à un carrefour. Là les deux prisonniers descendirent et les boches leur firent faire deux cents mètre environ dans un chemin étroit. À cet endroit isolé, les allemands firent mettre les Français à genoux, le torse nu, les mains liées derrière le dos, puis à bout portant, à 1,50 mètre cinquante, tirant coup par coup, ils assassinèrent les jeunes gens. Ischmerling atteint d’une balle à l’estomac et l’autre à la mâchoire fut tué sur le coup. Rioton reçut deux balles, l’une en pleine poitrine lui frôla le cœur, une autre dans la nuque lui mit la carotide à nu. Il tomba sur le sol perdant abondamment son sang, mais en conservant sa connaissance. Il vit ses bourreaux ramasser les douilles, il les sentit couper les cordes qui lui liaient les mains afin de faire disparaître les traces de leur forfait et laisser planer la responsabilité des crimes sur le maquis. Il les vit monter en camion et dut attendre leur départ avec une impatience facile à deviner.
Il eut alors le courage de parcourir, maintenant sa main sur sa poitrine, prés de huit cent mètres, pour gagner la ferme Méritet. Là il reçut les premiers soins, en particulier de l’instituteur de Saint-Sornin, M. Durand, puis d’un docteur de la région.
Ensuite il fut transporté clandestinement à l’hôpital de Montluçon. C’est là que trois jours après, la gestapo vint le réclamer, prouvant ainsi qu’elle avait des agents partout. heureusement grâce à diverses complicités, il échappa aux recherches de ceux qui voulaient achever leur œuvre de mort.
(1) chleus:nom donné aux allemands par les soldats de 1940. C’est l’équivalent de « boches »
Journal « Le Centre Républicain » du 25 septembre 1944

