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BESSON: Monument commémoratif du camp Casanova
BESSON: Monument commémoratif du camp Casanova

BESSON: Monument commémoratif du camp Casanova

BESSON: Monument commémoratif du camp Casanova

6 juin 1944…
Le camp Casanova se met en place à la ferme de Moladier. Après Bois-PIan, puis les bois de Bost à Besson, les combattants s’installent à Renaudière (Meillard) d’où ils conduiront leurs actions, en particulier sur le secteur Tronget-Souvigny. Leur périple du 14 juillet 1944, défilant à Treban, Cressanges, Souvigny… avait eu le mérite de mobiliser une population proche de sa délivrance, mais aussi l’inconvénient d’alerter les Allemands, les GMR et la milice de Pétain qui attaqueront les 16 et 18 juillet.

L’arbre en silhouette de pierre s’enracine ici comme la Résistance en Bocage Bourbonnais s’y était implantée. Ses racines se nourrissent des origines d’une paysannerie laborieuse de celles du monde ouvrier du bassin de Montluçon-Commentry, ou des bassins miniers du bocage… Ici la solidarité n’est pas un vain mot ! La Résistance y trouve tous les soutiens nécessaires à ses actions.
Les branches s’élancent dans toutes les directions d’où ils venaient, des bourgs et des fermes du bocage, de Moulins ou des usines de Montluçon, ou de Vichy ou d’ailleurs pour repartir par petits groupes en mission !
Sur le flanc du fût, les éclats nichés au creux de la pierre symbolisent toutes les vies perdues au combat, celles de Roger Bellien, de Marc Bonnot, de Xavier Dory, d’André Favier, d’Aimé Fugier, de Pierre Hierundie, de Georges Husson, de Pierre Peronnet , d’Alphonse Rinder, et de nombreux autres qui ont tant eu à souffrir des années durant de l’occupation Allemande et de ses funestes collaborateurs pétainistes…

Une mémoire à parcourir tout au long de 14 haltes au cœur du Bocage Bourbonnais !

Pour Xavier Dory, André Favier, Aimé Fugier, Pierre Hierundie, Georges Husson, Pierre Peronnet , et Alphonse Rinder voir:

Sur le site Histoire et Généalogie : Les fusillées de la Goutte Grandval

Sur « maitron.fr » Busset (Allier), La Goutte Grandval 7août 1944

Sur « dumaquisdebessayau152ri.fr » : Hommage à notre « cousin » André FAVIER

Paroles de la chanson « Maquisardes » (La marche de l’enfant roi)

par Yves Duteil

Si le jour est noir et sans saveur
Filles de la terre des seigneurs
La liberté semblera lueur
Une victoire d’amour et de cœur
Ici les bandits pour l’honneur
Fiers du courage de leurs sœurs
Rêvent d’une vie, d’un monde meilleur
Les maquisardes

Elles vivent dans l’histoire, dans nos mémoires
Leila, Giovanna, Santana, Maria
Leur destinée telle une tour d’ivoire
Elles vivent dans l’histoire, dans nos mémoires
Une lumière bien au-delà du soir

Les maquisardes, une source d’espoir

Quand l’aube maquillera le fleuve
Sonnera l’heure du bonheur
La dentelle deviendra douceur
Les maquisardes

Ce monument a été réalisé en 2020 par le Comité Local de l’ANACR Meillard – Le Montet avec le soutien de l’ONAC AVG de l’Allier et des collectivités locales pour acquérir la matière d’oeuvre : Conseil Départemental de l’Allier, Communes de Besson, Bresnay, Châtel de Neuvre, Chatillon, Cressanges, Deux-Chaises, Le Montet, Le Theil, Meillard, Noyant d’Allier, Rocles, Saint-Sornin, Souvigny, Treban et Tronget.
L’installation du monument en forêt domaniale a fait l’objet d’une convention établie entre l’ONF et l’association.

Article du journal collaborationniste « Le Centre »,
Quotidien de Montluçon, de l’Allier et de la Creuse.
11 Avenue du Maréchal Pétain, Montluçon
Directeur: Henri Bouché
le 25 juillet 1944

Le lundi 21 août 1944 sera le jour de la dernière édition du journal « Le Centre ». Il reparaît à partir 24 août 1944, publié par le Comité Départemental de la Libération de l’Allier sous le nom « Le Centre Républicain », portant le N° 1. Le journal est à la nouvelle adresse 11 Avenue du Président Wilson, Montluçon … L’avenue Maréchal Pétain a été rebaptisée ..


JUILLET 1944 – JUILLET 1945

Contribution à l’histoire des maquis bourbonnais

AUX PORTES DE MOULINS

les gars du camp « Danielle Casonova » pratiquait la guérilla

Coupures de presse du journal VALMY (Source AD03)

25 juillet1945

Il y a un an, après avoir subi une attaque d’une extrême violence, après avoir perdu au cours de la bataille deux tués, dix prisonniers et déplorant un blessé grave, les maquisards du camp Danielle Casanova se regroupaient et reprenaient leur action, quelques jours interrompus.

Mercredi dernier, à l’occasion de l’anniversaire de l’assaut déclenché le 18 juillet 1944 par une troupe importante de G.M.R. et de miliciens contre le camp, et de la rencontre sanglante au cours de laquelle deux jeunes patriotes : Roger Bellien et Marc Bonnet trouvèrent une mort glorieuse, l’Association nationale des Amis des Francs-tireurs et Partisans français organisait une manifestation à Coulandon et à Souvigny.

A COULANDON, une délégation du Comité directeur départemental se rendit au cimetière, accompagnée de la sœur de Roger Bellien, déposer une gerbe sur la tombe de ce dernier, et s’y recueillir quelques instants.

A SOUVIGNY, un cortège d’une centaine de personnes, conduit par le Maire, la Municipalité, le Comité de Libération, les délégués du Comité directeur de l’Association nationale des Amis des F.T.P. du Parti communiste et de l’Union des Femmes françaises, alla au cimetière fleurir la tombe de Marc Bonnet.

A l’issue de cette cérémonie, une réunion eut lieu dans la salle des Fêtes de Souvigny, sous la présence du Maire et en présence de 230 personnes.

Louis Moreau, du parti communiste, pris le premier la parole et glorifia les Francs-tireurs et Partisans. Le F.T.P. [illisible] lui succéda : « Des dizaines de milliers des nôtres, dit-il, sont morts en héros dans le combat pour la liberté. Ils avaient compris qu’il ne fallait pas attendre le concours de l’extérieur. Ils ont repoussé les lâches conseils des attentistes. Ils se sont jetés dans l’ardente bataille. Ils ont montré au monde le vrai visage de la France. Ces hommes de toutes conditions, de toutes croyances philosophiques et religieuses, ce communiste côte à côte avec le catholique, avec le socialiste sont morts avec le même courage. Ils n’avaient tous qu’un seul ennemi : l’oppresseur, le barbare, le nazi, le fascisme. L’œuvre qu’ils ont commencée et pour laquelle ils sont tombés sera réalisée envers et contre tous ceux qui voudraient y mettre obstacle. »

L’ancien du Maquis de Montaiguet-en-Forez, A. Ducat, instituteur de Bressolles, insista sur les résultats acquis par les F.T.P. en comparaison de faibles moyens matériels dont ils disposaient : sur le sacrifice des camarades morts pour la conquête des armes allemandes, pendant que des dépôts clandestins de matériel parachuté étaient criminellement inutilisés. Ces actions héroïques, les F.T.P. les ont accomplies avec des moyens de fortune. Est-il aujourd’hui nécessaire d’insister sur les conséquences de cette guérilla menée sans relâche contre l’occupant ?

La page de combat du 18 juillet 1944, cette page impérissable, écrite avec le sang de deux héros, abattus à leur poste par une compagnie de ces GMR aux ordres des boches contre la France, cette page fut évoquée ensuite par le lieutenant Léger, alias « La Pipe », alias « Lelourd » ancien officier du camp Danielle Casanova.

*

**

Mais l’histoire de ce maquis glorieux ne peut être inscrite sur une seule page. C’est une suite ininterrompue d’exploits, d’actions extraordinaires, que les Bourbonnais ne doivent plus ignorer …

Ils connaissaient les hommes qui dirigeaient ce camp établi dans les environs de Moulins : La Pipe, Sapin. Ils ont applaudi au jour de la Libération, le défilé discipliné du 206e bataillon, drapeaux et clique en tête. Mais ils ne savent pas, ou peu, ce qu’à été des semaines durant, la vie de ces hommes, au courage indomptable.

C’est pourquoi nous ouvrons pour nos lecteurs le journal du camp de Danielle Casanova.

(A suivre)

26 juillet 1945

(Suite)

C’est dans la forêt de Moladier, à l’époque où ordinairement les Moulinois vont en bandes joyeuses cueillir le muguet, que s’établit en 1944 le Camp Danielle Casanova. Le rassemblement était fort de 60 volontaires que rejoignit bientôt un contingent égal d’ouvriers de l’usine Bardet.

Au Bois Plan, au P.C., on rencontrait les officiers : les lieutenants Léger, alias « La Pipe », commissaire aux effectifs ; Martineau, commissaire aux opérations : Duffaut, dit « Sapin », commissaire technique.

L’armement était sérieux, grâce à des apports de matériel parachuté et dans les groupes, l’activité était fébrile. Chaque volontaire avait son travail déterminé et à travers bois, s’affairaient les ouvriers et les employés de Moulins, les paysans et les vignerons de Besson, de Bresnay, de Chemilly, de Cressanges, de Meillard, de Bressolles, de Marigny.

Au bout de quelques jours, le camp quitta Moladier pour Besson et planta ses tentes sur les terres du Pince Xavier de Bourbon-Parme, dans les environs du château de Bost. Il était temps. Peu après le départ, la forêt de Moladier était battue de fond en comble par la Feldgendarmerie.

La période d’organisation terminée, les groupes du camp Danielle Casanova passèrent à la guérilla. A chaque instant, des convois allemands étaient attaqués. Les boches n’avaient généralement pas le temps de revenir de leur surprise.

Une attaque vraiment réussie fut celle de Châtillon. Un détachement F.T.P. établit un barrage à l’aide de troncs d’arbres dans un virage de la route nationale N° 145, de Moulins à Limoges. Des heures s’écoulèrent dans l’attente de l’ennemi. Les cartes d’identité des passants furent contrôlés et les armes de deux gendarmes du Montet, réquisitionnées.

Soudain, à toute vitesse, arriva une voiture légère portant 5 officiers allemands, suivie d’un lourd camion de ravitaillement et d’un side-car. Surpris par le barrage, le convoi stoppa mais Sapin et son groupe lançaient des bombes au plastic et des grenades quadrillées. En quelques minutes, dans perte du côté français, 15 boches étaient tués et les véhicules carbonisés.

(A suivre)

28 – 29 juillet 1945

(Suite)

DEUX MIRACLES POUR SAPIN

Les Moulinois se souviennent de « l’ère des pylônes ». Ordre avait été donné à tous les détachements F.T.P.F. d’opérer les sabotages nécessaires pour priver d’électricité les usines travaillant pour l’ennemi. C’est ainsi que, coup sur coup, des bombes renversaient des pylônes à la Brasserie de La Madeleine, à Bressolles, à Vallières, au chemin de Halage, à Voussac (où l’opération effectuée conjointement avec le groupe sédentaire du capitaine Bouchard, permit de priver de courant les usines de Commentry et de Montluçon).

Une action particulièrement audacieuse fut entreprise par Sapin. Ce dernier avait décidé de miner de nuit un pylône gardé par deux postes allemands, à proximité du pont Régemortes.

Sapin, sous une pluie torrentielle, était en plein travail lorsqu’il fut surpris par une patrouille. Sans hésitation, un camarade de couverture tira sur les allemands une rafale de mitraillette, en tua deux, et en blessa grièvement un autre. Cerné, Sapin se vit perdu. Les boches affolés tiraient sur la moindre branche qui remuait, dans le moindre carré d’ombre, sur le moindre taillis … Le renfort arrivait de Moulins par camions. Une troupe imposante, armée jusqu’aux dents, cherchait un seul homme et cet homme conservait cependant son sang-froid.

Sans bruit, Sapin s’était laissé glisser dans l’eau : Enfouissant ses pieds et ses jambes dans la vase, il tenait son corps appliqué contre le talus à pic, et prêt à toute éventualité, son Colt au-dessus de sa tête.

Quatre heures durant, Sapin resta dans cette position, sans faire un mouvement, retenant sa respiration. Pensons au supplice de ce malheureux, glacé, abruti de fatigue et ne voyant pas de solution à sa critique situation. Les boches passaient et repassaient à 3 mètres de lui sans le voir, sans l’entendre. Ils s’éloignèrent enfin et Sapin rampa sur le sable pendant plus de 300 mètres jusqu’à ce qu’il se trouvât hors de leur portée.

Mais cette journée réservait un autre miracle pour Sapin. Les boches, fous de rage, ouvrant les portes à coups de crosse, fouillèrent à La Madeleine toutes les maisons … sauf une, celle de Sapin. Mme Duffaut était seule, gardant le dépôt d’armes dont elle avait la charge. Faute de temps, tout le matériel n’avait pas été camouflé et, sur la table, s’étalaient les mitraillettes, les revolvers, les munitions.

Dans un coin de la pièce étaient posés des machines à écrire et plusieurs sacs de tickets d’alimentation.

On peut dire que Sapin l’avait échappé belle ! …

A LA BARBE DES ALLEMANDS, LE DRAPEAU TRICOLORE FLOTTE SUR MOULINS

Que les lecteurs m’excusent de remonter un peu en arrière et de ne pas suivre un ordre strictement chronologique. Mais j’ai rencontré dernièrement le commandant Ameurlan, alias « Jean-Louis », ex « inter-régional-maquis » qui m’a détaillé d’autres exploits du courageux Sapîn, exploits que les Moulinois ont encore présents à la mémoire.

En Janvier 1944, vers minuit, Sapin secondé de La Pipe, plaça un drapeau tricolore au sommet du mât planté par les allemands à l’extrémité du Pont Régemortes, côté La Madeleine. Plaisir des patriotes, rage des boches, en voyant le lendemain matin flotter nos trois couleurs, à deux pas du poste de douane. Evidemment, ordre fut donné de descendre immédiatement le drapeau. La gérante du Casino de La Madeleine, Mme Roche, [illisible] chemise de nuit mais le [illisible] Moulinois en fut remonté [illisible] crans.

(A suivre)

1er août 1945

(Suite)

Le lendemain même, Sapin partait en mission en camionnette avec un groupe de 9 volontaires. A proximité de Meillard, un paysan les arrête et les avertit de la présence dans un sommet d’un poste allemand. Sapin donna l’ordre de sauter à terre, de se mettre en formation de tirailleurs et de se glisser dans les fossés. Bientôt, un feldwebel arriva, à bicyclette, à leur rencontre, mais sans les voir. Sapin visa soigneusement et l’allemand roula plusieurs fois sur lui-même. Aussitôt une mitrailleuse se mit à tirer, mais le servant eut le sort du feldwebel.

La riposte boche ne devait pas se faire attendre. Quelques heures après, 300 allemands, en provenance de St-Pourçain, encerclaient de nuit le camp et éclairaient sans interruption la campagne environnante à l’aide de fusées.

La bataille fut courte. Les gars de Danielle Casanova, avec un seul blessé, mais après avoir « descendu » 15 boches, dont un commandant, échappèrent de justesse, emportant tout l’armement, mais contraints de laisser sur place le matériel de cuisine et les véhicules.

Les allemands furieux de cette opération manquée, se vengèrent en faisant brûler une maison isolée, dépôt de ravitaillement du camp.

LE 18 JUILLET 1944

Il fallait prévoir une nouvelle attaque de masse. Ainsi le camp se regroupa-t-il dans le parc du château de Bost, en se protégeant de défenses hâtivement construites.

Et le 18 juillet, à 10 h. 30, le camp fut en état d’alerte. Un vrombissement de moteurs emplit soudain le parc ordinairement si paisible.

Les groupes de Danielle Casanova, s’ils étaient bien encadrés, disposaient par contre d’un armement insuffisant. Et il allait falloir engager une lutte inégale contre un ennemi puissant, miliciens et G.M.R. qui avaient reçu des consignes précises : anéantir le maquis, se rendre maîtres coûte que coûte des « terroristes ».

A 11 heures, 1.500 traîtres français à la solde de Pétain encerclaient le camp et tiraient les premiers coups de feu. Les 80 patriotes, animés de l’esprit de sacrifice le plus élevé, se déployèrent aussitôt à la sortie du parc et se disposèrent, selon le plan prévu, en formation de riposte, l’aile droite se dirigeant vers le périmètre ouest de Bois Plan et l’aile gauche en direction de Cressanges.

L’ennemi, s’apercevant du mouvement, utilise alors des armes à longue portée. L’aile droite de Casanova, profitant des replis du terrain, parvint à refouler un groupe de miliciens. C’est à ce moment que Roger Bellien tomba glorieusement, atteint par une balle.

Des heures durant la bataille fit rage, à un contre douze. Devant la tenaille qui de plus en plus resserrait ses mâchoires, les officiers du camp donnèrent l’ordre de repli général et du tir à volonté. C’était un vacarme assourdissant, un sifflement continuel de balles. Pas une haie, pas un buisson qui ne dissimule un G.M.R. « Limagne » ou « Bourbonnais », un milicien.

Finalement, l’étreinte fut forcée. Les patriotes parvinrent, après une marche très pénible sous un soleil accablant, à se frayer un passage à travers l’épais rideau d’ennemis. C’est alors que tombait à son tour le jeune Marc Bonnot.

A 5 heures de l’après-midi, le combat prenait fin. La pittoresque campagne retrouvait son calme, mais Casanova avait subi de lourdes pertes : deux morts, un blessé grave : le jeune Magnère, atteint de sept balles dans une jambe et d’une dans le bassin, neuf prisonniers.

Les G.M.R. et les miliciens, malgré leurs douze morts, ne pensèrent plus alors qu’au pillage et à la beuverie. Après avoir longuement interrogé le Prince Xavier de Bourbon-Parme qui leur tint tête courageusement et n’hésita pas à leur crier son indignation, ils réquisitionnèrent 3.000 litres de marc et pillèrent la ferme Dumont aux Vernasseaux. A 9 heures, ils se retirèrent enfin ivres morts.

Il y eut dans cette tragédie, deux épisodes qu’il faut souligner. A un certain moment de la bataille, pris de panique, des éléments de G.M.R. et de miliciens se tirèrent les uns sur les autres, croyant chacun avoir affaire à des patriotes. Un peu plus tard, arrivant inopinément dans la ferme Tantôt, les miliciens surprirent La Pipe. Aussitôt, ce dernier qui se trouvait dans le jardin, se transforme en un paisible ouvrier agricole, plantant ses choux … Et l’ennemi poursuivit son chemin

(à suivre)

4 – 5 août

(Suite)

Pâques 1944. Sapin et La Pipe décidèrent de « remettre ça ». Madame Duffaut consacra un après-midi à teindre de bleu et de rouge un drap de lit. Pendant que La Pipe, mitraillette à la main, scrutait l’obscurité, Sapin fit l’ascension de l’immense pylône de la Brasserie et attacha le drapeau à l’un des fils.

Le lendemain matin, l’étonnement et la joie des Moulinois ne furent dépassés que par la colère des boches. Le drapeau sur lequel se lisait l’inscription : « Le Maquis de passage, Honneur et Patrie » flottait à 20 mètres de hauteur entre le pylône et le pont Régemortes. Fous de rage, les boches intervinrent auprès des autorités françaises. Les uns après les autres, tous les services furent alertés et ce n’est qu’à 13 heures que nos couleurs furent descendues.

Personne ne s’expliqua comment le drapeau avait pu être amené là. Voici d’ailleurs la lettre qu’écrivait le jour même le Commissaire spécial des Renseignements généraux à Vichy : « Dans la nuit du 8 au 9 avril, des inconnus ont réussi à placer un drapeau français sur le fil de protection de la ligne de haute tension qui traverse le pont Régemortes. Il s’agissait d’un drapeau de un mètre sur 1 m. 50 portant sur la partie blanche une inscription. Le drapeau enlevé par les ouvriers du secteur électrique de Moulins, a été porté au Commissariat de police de Moulins. Les investigations effectuées dans le but de découvrir les auteurs de cet acte n’ont encore donné aucun résultat. M. le Directeur du secteur électrique estime nécessaire la participation d’au moins deux individus et précise qu’ils étaient initiés aux questions électriques, car il y avait grand danger de passer près des lignes de haute tension, l’écart n’étant que de deux mètres et le travail ayant été effectué la nuit ».

En réalité, les choses s’étaient passées très simplement. Sapin du haut du pylône, après avoir fixé au fil un côté du drapeau avait accroché sur le côté opposé une glissière mue par une longue ficelle. Il avait suffi ensuite à Sapin et à La Pipe d’entraîner de la route le drapeau à l’endroit voulu, en le faisant glisser le long du câble électrique. Après quoi, d’un coup sec, la ficelle avait été cassée à l’endroit prévu …

ORGANISATION DU CAMP

Peu à peu, le camp perfectionnait son organisation. Il était installé dans la propriété du Prince Xavier de Bourbon-Parme, et nous aurons l’occasion de revenir sur la magnifique attitude de ce dernier, qui se conduisit en inflexible patriote. Nous savons ce que cela lui a coûté.

Mais pour que le maquis puisse vivre, il fallait des moyens de locomotion et Sapin, commissaire technique, mit sur pied le parc de voitures. Ce furent coup sur coup les réquisitions d’un car Citroën transportant des ouvriers de Moulins à Lurcy-Lévy, de l’autobus départemental de Moulins à Bourbon-l’Archambault, d’un camion à Souvigny, de la voiture de tourisme de M. Roussillon, alors secrétaire général de la Préfecture, etc … Toutes ces opérations se passèrent le plus normalement du monde, sauf une.

Un carrossier de la rue de l’Oiseau, M. Tanner, avait transformé pour le compte des boches une camionnette en ambulance. Sapin décida d’enlever la voiture, s’ouvrit de son projet aux ouvriers qui se mirent sans hésitation à sa disposition. A l’heure dite, Sapin arriva à l’atelier et avertit M. Tanner.

Aussitôt, ce dernier bondit au téléphone et alerta la Feldgendarmerie. Sapin fut obligé de fuir …

Maudissant le traître, Sapin se promit en revanche de détruite une voiture allemande. L’occasion lui en fut bientôt donnée. A l’aide d’une bombe magnétique à crayon de retardement, il fit sauter un car de la Wehrmacht en plein jour et en pleine ville, rue Delorme.

UNE DÉBORDANTE ACTIVITÉ

Chaque jour, les groupes, les équipes sous les ordres de leurs officiers, partaient parfois fort loin, effectuer des missions toujours périlleuses.

Citons, au hasard, les destructions de transformateurs, à l’usine Decauville, aux ateliers Bardet : les arrestations de miliciens et de bandits des « faux maquis » …

C’était en effet l’époque où se multipliaient des noyaux d’individus sans vergogne et sans scrupule, commandés par des voleurs, ce qui terrorisaient certaines régions, violant, assassinant, détroussant, et se faisant passer pour des formations de la Résistance.

La Résistance, elle, devant cette situation, organisa une police spéciale, et fit la chasse à ces bandes. Je me souviens de ce dirigeant de faux maquis, qui avait suivi des cours spéciaux à la caserne de la L.V.F. à Versailles et qui percevait mensuellement 6.000 fr. et diverses primes pour donner sur les concentrations de maquisards, des renseignements à la Gestapo.

Et l’autre jour, Sapin fit arrêter et emprisonner à Clermont-Ferrand l’ancien chef d’un groupe de pillards qu’il avait reconnu sous l’uniforme de sergent de la sécurité militaire !

Le 14 juillet 1944, le camp Danielle Casanova en armes et dans un ordre rigoureux, défila dans la petite ville de Souvigny, au milieu d’une population enthousiaste, présenta les armes devant le Monument aux Morts, pendant que les officiers en recouvraient le socle de magnifiques gerbes tricolores.

LA PREMIÈRE ATTAQUE

Les boches décidèrent de surveiller plus étroitement cette portion de notre département. Chaque nuit, montés sur de silencieux camions, ils gagnaient des carrefours, des virages, des sommets de côte et là, en embuscade, ils veillaient, doigts sur la gâchette, visages noircis, jusqu’au jour.

Mais les paysans des détachements sédentaires avaient presque toujours la possibilité d’avertir le camp, et les agents de liaison ou les groupes en opérations empruntaient une autre route. Cependant, La Pipe et un chauffeur, passant en voiture dans les environs de Lafeline, furent surpris par un poste allemand. Ils eurent bien des peines à sortir du véhicule, criblé de balles, et à échapper au tir des fusils mitrailleurs.

(A suivre)

Malheureusement je n’ai pas trouvé la suite des articles …


Une nouvelle victime de la gestapo identifiée

L’enquête diligentée par l’inspecteur Gonard de la 6ème brigade régionale de la P.J. de Clermont-Ferrand (Puy de Dôme) a permis d’identifier une victime.

Il s’agit du nommé MAURICE Claudius Marie, né le 20 janvier 1920 à Neuilly le Réal, mécanicien, qui demeurait chez ses parents, Rue du Coularay à Moulins.

MAURICE appartenait au maquis « Danielle Casanova ». Il avait été arrêté à Besson le 7 juillet 44 lors d’une rafle effectuée par les allemands et la gestapo. Conduit dans les cellules de la gestapo sises 127, Boulevard des États-Unis à Vichy, il fur ensuite lâchement assassiné par les occupants le 15 août 44 au lieu dit « le Bois du Cluzel », situé route de Molles – Le Mayet de Montagne.

On se souvient que la photographie de la victime avait été exposée dans le courant de l’année 1945 devant l’église Saint Louis à Vichy.

Valmy 9 et 10 février 1946

A notre ami Maurice Claudius

Celui qui m’avait dit dans notre étroite cellule de la gestapo à Vichy, en compagnie de son ami intime André Baisle, « s’ils nous fusillent, nous leur chanterons La Marseillaise », a été retrouvé lâchement assassiné par la gestapo dans un petit bois près de Cusset.

« Antoine » l’inséparable compagnon du lieutenant Sapin pour tous les coups de mains, celui qui bondissait de joie chaque fois qu’au Camp Danielle Casanova, nous décidions d’une opération d’envergure contre le boche, a payé de sa vie son amour pour notre pays le 15 août 1944.

Pour qui a connu Maurice, le jeune militant communiste, le jeune sportif de l’U.S.O.M., éprouvera une immense tristesse et une grande douleur.

Notre jeune ami fut un résistant de la première heure, n’est ce pas Raymond GRAND ? N’est ce pas Lt LAPIPE (1) ? Un F.T.P. sur lequel on pouvait compter.

Infatigable, l’inaction lui pesait, agir était sa raison d’être. Elle fut hélas la cause de sa fin.

Maurice ajoute à la liste longue de nos martyrs du Camp Danielle Casanova : du LT Jean Marie Burlaud, de Roger Bellien, de Marc Bonnot, tués à l’ennemi, du père et du fils Berthon, de Favier « Le Légionnaire », du jeune Fugier, du jeune catholique Dory, dit Charrier, fusillés à Saint-Yorre, de nos disparu, le Lt Fernand dit Lapin, de l’adjudant Baisle André dit Gaspard ; Lourd tribu payé à la cause de la liberté.

Que ceux qui implore la clémence pour les assassins méditent et se souviennent ; que ceux qui doutent des destinées de notre patrie s’inspirent de l’esprit de sacrifices qui animait nos héros.

Que ceux qui furent leur camarades de combat y puisent une raison de plus pour lutter pour l’idéal de paix, de justice et de liberté qui était le leur.

Que la famille de notre cher Maurice Claudius soit fière dans son immense douleur d’avoir eu un fils qui fut un bon Français.

André BONNET

Valmy 14 février 1946

(1) S’agit il de Charles Léger ?

NEUILLY-LE-REAL


Une foule considérable aux obsèques

du patriote MAURICE Claudius

Les obsèques du jeune patriote Maurice Claudius fusillé par les allemands le 15 août 1944, ont eu lieu hier à Neuilly le Réal en présence d’une foule très nombreuse évaluée à 2000 personnes.

Nous avons remarqué dans l’assistance, plusieurs personnalités et délégations.

M. le maire de Neuilly-le-Réal et le Conseil municipal, nos amis Gatepain, adjoint au maire de Bessay et Mitton, adjoint au maire de Bresnay et les représentants de la Gendarmerie, le commandant Lacareau, du service social de l’armée, Mme Gours Capelein et M. Crouzier, déporté, de la direction du C.O.S.O.R., Raymond Grand, directeur de notre journal ; les délégations suivantes : Association des familles de fusillés, avec Mme Vebret, M. Antonin Berthon, l’usine Bardet représentée par le secrétaire du syndicat, notre camarade Boutonnet dont la gerbe offerte par le personnel et la direction fut très remarquée ; l’E.S.O.M.Y. avec M. Malvaux, conseille municipal de Moulins et M. Bouquillat, président de l’Association ; le Front National avec son drapeau, cette délégation était conduite par son président, Bodin, conseiller Municipal et Thomas ; Les lieutenants Léger et Duffaut, chefs du Camp F.T.P. Danielle Casanova, auquel appartenait le Sergent Maurice Claudius, avec leurs drapeaux ; les Mutilés de guerre et les anciens Combattants de Neuilly-le-Réal ; M. Chatelin conduisait les jeunes écolières et écoliers, etc.

La cérémonie religieuse fut assurée par M. l’abbé Gay, de Montluçon, qui fut détenu avec la victime dans les geoles de la gestapo .

Au cimetière, notre camarade Bonnet André, le compagnon de lutte du jeune patriote Maurice, arrêté en même temps que lui, puis déporté à Dachau , prononça au nom de l’Association départementale des anciens F.T.P.F. un émouvant discours ou il rappela la vie héroïque du sergent Maurice Claudius qui a incarné a-t-il dit : « les qualités de cette jeunesse française qui par traditions, par atavisme, se place toujours dans les rangs des combattants de la liberté et a donné à notre pays tant de héros connus ou obscurs du colonel Fabien au sergent Maurice »

Cette manifestation restera gravée longtemps dans le cœur des personnes assistant à cette cérémonie d’une ampleur vraiment exceptionnelle.


Trois capitaines du Maquis

Journal Valmy du 21/22 oct 1944

Trois soldats, 3 officiers, 2 Français, un Tchèque unis dans une foi commune, dans un âpre destin fait d’héroïsme obscur et d’impétueuse audace : les capitaines Sapin, Martineau et Arsène.

Modeste comme tous les hommes vraiment courageux, c’est par bribes qu’ils nous font la relation de leurs prouesses.

Ils commencent la lutte seuls, isolés, dès janvier 1944. Leur activité consiste en la destruction de lignes haute tension, de transformateurs et de pylônes. S’enhardissant, ils « réquisitionnent » deux cars Citroën et une voiture, et « récupèrent » l’argent des perceptions, du tabac et des cartes d’alimentation.

En mai, recevant de la région militaire ordre de gagner le maquis, ils font l’apport de leur jeune énergie au camp Casanova ainsi nommé en souvenir d’une héroïne bien française, Danielle Casanova, secrétaire générale des Jeunes Filles de France, morte au camp d’Auschwitz. Ils y trouvent la camarade Hélène RAULT qui leur servira d’infirmière sans toutefois refuser de faire le coup de feu quand les circonstances l’exigeront.

Châtillon marque leur premier coup d’éclat au nombre de 9, ils attaquent 4 voitures dont l’une transporte 6 officiers . Résultat : gain de 1 voiture, 15 morts chez les « feldgraus ».

Puis en pleine région infestée d’allemands, ils commencent une épuration systématique. Barrages qui contrôle les papiers, expéditions chez les miliciens. L’arrestation des traîtres était assurée par un « groupe spécial » choisi parmi les corps francs.

Ce fut lui – dont firent partie nos trois capitaines – qui s’assura de la personne de Duchateau, chef de faux maquis à la solde de la gestapo et qui, s’adonnant à des actes de banditisme, jetait le discrédit sur le vrai maquis. Ils réussirent aussi à exterminer la bande entière dans une ferme qu’ils durent parfois prendre d’assaut au bout de plusieurs heures de combat.

C’est dans l’une de ses expéditions contre le faux maquis que le capitaine Sapin faillit voir la fin de son aventureuse odyssée. Il tomba malencontreusement sur un barrage allemand. Il tua le servant du F.M. de deux coups de feu et allongea cinq autres boches sur le carreau. Mais lui et ses hommes sont dans l’obligation de s’enfuir en abandonnant leur matériel, et poursuivis par 300 ennemis ils se replièrent sur le camp de Besson, où le prince de Bourbon leur offre l’hospitalité dans son parc.

C’est là qu’ils doivent bientôt soutenir l’assaut de 1300 miliciens et GMR du groupe Limagne. Les maquisards sont à peine une centaine. A leur tête se trouve un individu nommé Reverdy, qui en réalité est un milicien et qui bien entendu profite de l’occasion pour les trahir. Après un combat désespéré, les maquisards gagnent Marigny où ils réorganisent leur camp.

Ce sont eux qui dirigent la cérémonie du 14 juillet à Souvigny que plusieurs d’entre vous ont pu admirer : le village est pris d’assaut à midi.

La population s’assemble sans un mot sur la place. Les maquisards se rangent devant le monument aux morts. Ordre parfait. Un officier dépose une gerbe de fleurs des champs. Le drapeau est hissé. Salve de mitraillettes. Air martial noble, grave. Dans la foule enthousiaste, délire ! Tous entonnent la Marseillaise.

Quelques jours plus tard ils font dérailler le train Moulins-Montluçon sous un tunnel après en avoir fait descendre les voyageurs, sauf 6 allemands et 2 miliciens qui s’écrasent avec leurs wagons.

A cette époque ils commencent l’épuration de la Madeleine qu’ils débarrassent de 22 miliciens. Ils attaquent le corps de garde du pont Régemortes faisant 7 allemands prisonniers avec leurs armes.

Puis ils plusieurs accrochages sérieux avec les colonnes blindés de la fameuse division « das reich » (rappelez vous l’abominable tuerie de Marigny ou 6 français furent martyrisés avant d’être fusillés à bout portant et où le lieutenant Lelong (Burlaud) fut coupé en morceaux par les soudards nazis.

Nos amis décident bientôt de faire sauter l’atelier de Chargement. Il réussissent à rendre inutilisable 17 tonnes de mines antichars et une plaque tournante. Au retour de cette expédition, le capitaine Sapin reste caché pendant toute une nuit dans l’allier, à quelques mètres d’un allemand aux aguets.

Il se vengent élégamment en déposant une bombe sous un car, boulevard de Courtais, tout en faisant mine de nouer ses lacets et en disant à une voisine épouvantée par l’explosion : « ah ! Ces gazogènes tout de même !»

Ils résident tous trois à Moulins, depuis la libération. Mais ils ne font qu’un vœux : partir la-bas, à l’est poursuivre la même vie de lutte et d’audace au service de leur Patrie.

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